Last Night of Winter – L’Écho d’une Nuit Perdue



Le froid de la pierre s’infiltrait dans les os nus du Gardien. Allongé au fond d’une cellule oubliée, il ouvrit les yeux sans paupières et ne vit que ténèbres. Il ne se rappelait ni son nom, ni les raisons de sa réanimation, mais un sentiment pesant demeurait : il lui fallait atteindre la tour. Une voix éthérée, faible, susurrait depuis l’obscurité des mots oubliés, lointains, comme un souvenir brisé. Les chaînes rouillées qui l’entravaient n’étaient plus qu’un décor ; il se leva, déterminé, sans savoir encore qu’il portait en lui le poids d’un passé tragique.

Le couloir devant lui était envahi par les toiles d’araignée et les relents d’humidité. Les torches éteintes ne servaient plus qu’à signaler la présence d’une civilisation révolue. Des créatures décharnées erraient, comme lui, sans but ni mémoire, mais avec une rage aveugle. Armé d’une simple épée rouillée, il les affronta, ses gestes guidés par un instinct de guerrier oublié. Chaque pas vers la surface éveillait en lui un écho, une mémoire fragmentée, une vie effacée par une nuit trop longue.

Il atteignit bientôt la salle des sceaux, une pièce circulaire ornée d’inscriptions anciennes. Là, une voix plus claire s’éleva – celle d’Elior, le dernier prêtre du Bastion, piégé entre les mondes. Elior reconnut le Gardien et lui rappela sa mission : mettre fin à la Nuit de l’Hiver, un sort maudit né d’un pacte interdit. La malédiction avait figé le temps, enseveli la lumière, et condamné les vivants à mourir, et les morts à errer sans repos. Pour briser le cycle, il devait rallumer les quatre flammes sacrées et gravir la Tour de la Dernière Veille.

Elior lui offrit une gemme de lumière, outil ancien capable de purifier les ténèbres et d’éclairer les souvenirs perdus. Dès qu’il la toucha, une bribe de son passé ressurgit : un champ de bataille, des cris, et lui, à genoux, au pied d’un roi tombé. Il n’était pas un simple soldat ; il avait été le Gardien royal, dernier protecteur d’un royaume tombé dans l’oubli. Une promesse murmurée au chevet du monarque défunt le liait à sa tâche : veiller sur les ruines jusqu’à la fin de la Nuit. Désormais éveillé, il devait l’accomplir.

Il franchit la porte ancienne, activée par la gemme, et laissa derrière lui les entrailles du Bastion. Devant lui s’étendait un pont effondré, au-delà duquel se dressait la première flamme. Le vent portait une cendre glacée, preuve que l’hiver ne s’était jamais terminé. La lune restait figée dans un ciel sans aube, témoin de l’éternité déformée. Mais dans son cœur d’os, une étincelle avait repris vie. Le Gardien marcha, l’épée à la main, prêt à rallumer la première lueur d’espoir.



Le chemin vers la première flamme traversait les ruines d’un ancien village, autrefois prospère, désormais figé dans un silence glacé. Les statues pétrifiées de ses habitants gardaient les rues, comme si le temps s’était arrêté au moment même où la malédiction s’était abattue. Le Gardien marchait entre les souvenirs pétrifiés d’un monde qu’il avait peut-être protégé jadis, sans parvenir à se souvenir de leurs visages. Une brume épaisse voilait la lumière de la lune, étouffant toute chaleur. Pourtant, au cœur de la place centrale, un autel fumait encore, gardien de la première flamme sacrée.

À peine s’en approcha-t-il que surgit le Spectre de Dorne, ancien chevalier du roi, maintenant consumé par la haine et l’oubli. Dorne fut autrefois un frère d’armes, un ami peut-être, mais le Gardien ne pouvait que deviner leur lien à travers les cris de douleur du monstre qu’il affrontait. L’épée du Gardien trancha dans les souvenirs et la colère, tandis que le feu renaissait lentement derrière lui. Ce combat ne fut pas glorieux, mais nécessaire. Lorsque la dernière étincelle du Spectre s’éteignit, une vague de chaleur douce traversa la place, repoussant la brume.

La première flamme était rallumée, et le Gardien sentit ses forces grandir. La gemme de lumière pulsa dans sa main, révélant une nouvelle vision. Un banquet. Une nuit de célébration. Le roi, souriant, posait une main sur l’épaule du Gardien. « Tu es mon bouclier, même dans la mort », disait-il. Le souvenir était fragmentaire, mais chargé d’émotion, et il raviva sa détermination. Un autre nom lui revint : Syril, un jeune apprenti mage du Bastion, disparu durant la Nuit. Était-il en vie ? Prisonnier, comme Elior ?

Le chemin vers la tour passait désormais par les cryptes profondes, là où les flammes jumelles de la sagesse reposaient. Des voix résonnaient dans les couloirs souterrains, échos d’anciens prêtres déchus, damnés pour avoir voulu comprendre l’origine de la Nuit. Le Gardien, bien que mort, n’était pas l’un des leurs : lui n’avait pas fui, il était tombé en combattant. Dans l’obscurité, il affronta des ombres informes, vestiges d’âmes brisées par la peur. Chaque combat ravivait sa conscience, comme si la douleur lui redonnait son humanité.

Aux portes du sanctuaire souterrain, un brasier immense attendait, protégé par les Sœurs du Silence, gardiennes muettes de l’esprit. Leur ballet de lames était une danse macabre, mortelle, mais il en perça le rythme, guidé par l’écho des chants d’Elior. Lorsqu’il abattit la dernière Sœur, le silence devint sacré : non plus oppressant, mais apaisé. En allumant la deuxième flamme, il sentit le monde frémir. Le ciel changea imperceptiblement. La lune sembla vaciller. La fin de la Nuit n’était plus une illusion. Il n’était plus seul dans cette lutte oubliée.



Le vent s’était levé sur les hauteurs du Bastion, emportant avec lui des volutes de neige cendreuse. Le Gardien poursuivit sa route en direction du Col de Verre, un passage escarpé entre les montagnes, anciennement utilisé par les pèlerins en quête de purification. Désormais, seuls des ossements et des pierres brisées témoignaient du passage des vivants. Il avançait avec précaution, ses pas résonnant entre les falaises, quand un hurlement lugubre fendit l’air glacé. Une bête maudite, fusion de chair, de métal et d’ombres, bondit hors des rochers : le Veilleur du Col.

Il fut un homme jadis, un protecteur dévoué, mais la Nuit l’avait corrompu au point d’en faire un monstre de douleur. Le combat fut brutal, le Gardien esquivant ses assauts furieux, cherchant des ouvertures, rappelant des techniques apprises autrefois. Une pensée le traversa : et si lui aussi, un jour, succombait au même destin ? Mais son esprit tenait bon. Lorsqu’il porta le coup final, il vit dans les yeux de la créature une lueur de paix, comme si sa délivrance avait été attendue. Le silence retomba, plus lourd encore.

Dans la caverne du Col, la troisième flamme reposait, à moitié éteinte, entre des cristaux de glace bleus. Le Gardien y déposa la gemme, qui absorba la lumière du feu encore dormant. L’éclat jaillit, réchauffant la roche, chassant la neige du sanctuaire. Cette lumière éveilla une vision plus forte que toutes les autres : Syril, prisonnier dans les profondeurs du Bastion, tourmenté par les Échos. Il l’appelait. Il criait son nom. Le Gardien vit enfin son propre visage, jeune, vivant, plein d’honneur. Il se souvenait. Il s’appelait Caelum.

Ce nom, oublié depuis des siècles, le ramena à sa promesse. Il n’était pas un revenant sans cause. Il était Caelum, Gardien du Roi Alaric, protecteur du Bastion. Et Syril, le dernier espoir du royaume, devait être sauvé avant que la quatrième flamme ne s’éteigne à jamais. Il quitta les hauteurs et descendit dans les grottes antiques, là où les morts murmurent encore. Les couloirs étaient faits de pierre vivante, résonnant à chaque pas comme si le monde lui-même se souvenait de sa chute. Des fresques racontaient l’histoire de la Nuit : un pacte, une trahison, une punition éternelle.

Au centre du sanctuaire funéraire reposait un cristal noir, source de la corruption. Syril y était enfermé, son esprit emprisonné par un esprit ancien : le Jugement. Caelum affronta l’esprit dans une bataille mentale et physique, où les souvenirs et les regrets devenaient des armes. Le Jugement tenta de lui faire croire que sa mort avait été inutile, que son roi l’avait sacrifié. Mais Caelum tint bon. Il sauva Syril, détruisit le cristal, et ralluma la quatrième flamme avec l’aide du jeune mage. À présent, les quatre lumières étaient en place. Il était temps de gravir la Tour.



La Tour de la Dernière Veille se dressait comme un spectre d’obsidienne au cœur du Bastion, transperçant les cieux figés d’une lune éternelle. Caelum et Syril s’en approchèrent, leurs pas résonnant sur les dalles craquelées, marquées par les siècles. À chaque étage gravis, les couloirs devenaient plus tortueux, hantés par les souvenirs distordus du royaume déchu. Des illusions leur faisaient revivre des instants de gloire et de chute : l’assassinat du roi, la rébellion des mages, la première éruption de la Nuit. Le mal n’était pas venu de l’extérieur : il avait germé au cœur même du trône.

Syril, de plus en plus troublé, révélait à Caelum des fragments de vérité qu’il n’avait jamais connus. Le roi Alaric, acculé par le désespoir de la guerre, avait scellé un pacte interdit avec l’Entité du Froid Éternel. Ce pacte, censé protéger le royaume, avait au contraire figé le monde et sacrifié ses habitants. Syril, témoin malgré lui, avait été enfermé pour avoir tenté d’alerter les prêtres. Son esprit avait été fracturé par le sort, et seul le réveil de Caelum avait rouvert la voie vers la réparation. Mais le temps leur était compté : l’Entité veillait.

Ils atteignirent le sanctuaire supérieur, gardé par les Ombres du Pacte – les anciens conseillers du roi, désormais fusionnés à la glace et à la magie noire. Le combat fut long, éreintant, et Syril faillit y laisser la vie. Caelum, porté par sa mission, libéra les flammes accumulées dans la gemme, purifiant le lieu au prix d’une partie de sa propre force vitale. Quand le dernier conseiller tomba, la salle s’ouvrit, laissant apparaître le sommet de la Tour. Au centre, une colonne de lumière glacée perçait le ciel, scellée par un cœur de glace battant lentement. C’était là que reposait l’Entité.

L’Entité du Froid Éternel prit forme sous leurs yeux : ni homme ni bête, mais une silhouette informe faite de douleur, de silence et de trahison. Elle parla sans bouche, sa voix résonnant dans l’âme. Elle offrit à Caelum un choix : devenir son héraut et préserver l’éternité, ou la combattre et condamner l’équilibre du monde. Syril supplia son ancien protecteur de se souvenir de qui il était, de la promesse faite au roi, non de prolonger la souffrance mais de la réparer. Caelum serra la gemme contre lui, regarda l’Entité dans les yeux, et refusa le pacte.

La bataille finale fut colossale. L’Entité tordait l’espace autour d’eux, ralentissant le temps, gelant la lumière. Mais Caelum avançait, pas à pas, bravant les illusions de ses regrets, tenant bon contre les appels au renoncement. Syril, malgré ses blessures, projeta la flamme sacrée sur le cœur de glace, brisant peu à peu la carapace de l’Entité. Lorsque Caelum planta son épée dans le noyau de givre, un cri sourd traversa la tour, et une explosion de lumière envahit les cieux. La Nuit de l’Hiver était sur le point de prendre fin, mais le prix restait à payer.



Lorsque la lumière se dissipa, un silence d’une pureté irréelle enveloppa le sommet de la tour. L’Entité avait disparu, consumée par la flamme, et la glace éternelle commençait à se fissurer autour du cœur du Bastion. Syril s’écroula, vidé, mais vivant. Caelum, quant à lui, tenait encore debout, bien qu’aucune chaleur ne l’animât plus vraiment. Son regard se porta vers l’horizon, où les premières étoiles recommençaient à scintiller dans un ciel autrefois figé. Le cycle reprenait, lentement, comme si le monde retenait encore son souffle avant l’aube.

Les escaliers s’effondraient derrière eux, mais la Tour ne tremblait plus de colère. Elle se vidait de son pouvoir, comme si elle acceptait enfin de mourir. Syril, appuyé contre un pilier, observa Caelum s’approcher de l’autel central où la gemme flottait, désormais stable, pure. « Que va-t-il t’arriver ? » demanda le jeune mage d’une voix brisée. Caelum ne répondit pas immédiatement. Il posa la gemme sur le socle de pierre, et la flamme ultime jaillit, libérant une onde qui se répandit dans tout le royaume. La Nuit fut brisée. L’Hiver, terminé.

Mais ce genre de miracle exige un gardien, un dernier veilleur. Caelum sentit son corps se fragmenter lentement, non dans la douleur, mais dans la paix. Il devenait lumière, souvenir, gardien d’un monde enfin libre. Syril le vit disparaître comme une lueur portée par le vent, et il sut que le sacrifice ne serait jamais oublié. Lorsqu’il quitta les ruines, le soleil se levait pour la première fois depuis une éternité. Les statues pétrifiées fondaient, les rivières se remettaient à couler, et le peuple, lentement, s’éveillait d’un long cauchemar.

Syril reprit la route, portant en lui la mémoire de Caelum, du roi Alaric, et de tous ceux qui avaient péri dans l’oubli. Il deviendrait le nouveau gardien de l’histoire, le lien entre les vivants et les morts, entre le passé gelé et l’avenir à bâtir. Le Bastion renaîtrait, non comme une forteresse, mais comme un sanctuaire. Et chaque hiver désormais, on allumerait cinq flammes dans les hauteurs pour ne jamais oublier la dernière nuit. Celle où le Gardien, revenu de la mort, avait offert au monde un nouveau matin.

Votre serviteur, TomuGame.

✅ Points positifs :

  • Narration subtile et touchante
    Le scénario se dévoile lentement à travers l’environnement et les visions, encourageant la réflexion et l’interprétation.
  • Système de progression clair
    Les mécaniques sont simples mais efficaces : récupération de fragments de mémoire, flammes à rallumer, ennemis à vaincre.
  • Direction artistique réussie
    Le style rétro est élégant et sert parfaitement l’ambiance glaciale et pesante de l’univers.
  • Difficulté bien dosée
    Le challenge est présent sans être injuste, avec un bon équilibre entre exploration, combat et narration.
  • Univers cohérent et intriguant
    Le monde du jeu, bien que minimaliste, regorge de détails narratifs et visuels qui renforcent l’immersion.
  • Ambiance immersive et unique
    Une atmosphère froide, mélancolique et mystérieuse parfaitement servie par l’esthétique pixel-art et la musique.

Points négatifs :

  • Durée de vie assez courte
    Le jeu peut se terminer en quelques heures, ce qui peut laisser certains joueurs sur leur faim.

Last Night of Winter: Last Night of Winter est une aventure courte mais profondément marquante, qui réussit à captiver grâce à une direction artistique maîtrisée, une ambiance poignante et une narration environnementale subtile. Son monde gelé, empreint de mystère et de mélancolie, offre une expérience immersive que l’on n’oublie pas facilement. Si sa durée de vie limitée et son manque de rejouabilité peuvent frustrer certains joueurs, ces défauts sont compensés par une atmosphère forte, un gameplay bien équilibré et une histoire touchante portée par le silence et les symboles. Pour tout amateur de jeux narratifs à l’esthétique soignée, Last Night of Winter vaut clairement le détour. Note finale : 8/10 TomuGame

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von 10
2025-05-19T18:10:30+0200

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